[Arrive de ICI ]

Sans me faire prier, je m'en tournais vers le mur détruit, me positionnant proche de Ydris. Tentant de jeter un œil dans le passage, rien ne me permettait de voir quoi que ce soit, ni aucunes sources de magie. Je ne percevais qu'une esquisse du dédale et, plus il s'enfonçait, plus il s'effaçait. Après tout, j'étais surprise de voir que y avait de tels souterrains qui m'étaient inconnus. Était-ce la voie de fuite d'abord prévue par Dummkhar ? Étaient-ils tous les deux de mèche, Fidia et lui ? Enfin... peu importait la réponse, fallait s'y engouffrer et trouver la voie jusqu'à la surface.

- J'y serai bien allée en première mais vous feriez confiance à une aveugle pour vous guidez, vous ? Moi non, personnellement. Enfin, à moitié confiance. Je suis pas pleinement aveugle... Mais dépêchez-vous par contre. Ça ne déconne pas ce qu'elle va faire ! Faut filer, tout de suite ! Annonçai-je au groupe, sous le stress d'une mort imminente, alors que je m'approchais de Dummkar, lui saisit la main et le tirai avec moi dans le dédale. Peu importe où il menait, je ne comptais pas le laisser mourir bêtement ici à poireauter.

Tenant fermement sa main, ne marchant pas trop vite non plus pour m'éviter de trébucher sur le premier petit décroché au sol venu. Je nous engouffrais à travers le passage ouvert par Fidia. À peine avais-je mis un pied à l'intérieur de cette zone qui m'était inconnue, je ressentais immédiatement une chute de température et une odeur bien typique des lieux abandonnés en souterrains. Il y régnait un silence absolu en-dehors de nos pas résonnant en écho sur les parois rocheuses. Lâchant la main de Dummy, je m'avançais à tatillons, un pas après l'autre.

- J'ai honte... mais est-ce que tu pourrais me guider... s'il te plaît...? Lâchai-je, emprunt de gêne, à Dummkhar, ma main gauche posée sur une paroi froide et humide du couloir. J'en conviens qu'on doive avoir une discussion tous les deux après que l'on soit sortis de là, j'aimerai pouvoir m'excuser correctement et m'assurer que tu n'as vraiment aucunes blessures...

Continuant à progresser doucement, tout en parlant, j'essayais de contenir mon envie de partir en courant. Le moindre faux pas, je pouvais me tuer toute seule, Fidia n'aurait rien à y faire... Mais je m'attendais à ce que Dummkhar me dirige ou passe devant moi comme on le faisait d'habitude lors de nos expéditions dans les longs couloirs que nous parcourions pendant des heures, voire des journées... Mais au fond, je préférerais de loin que Pheare, Ydris ou Mina passe devant. Elles étaient sûrement plus robustes que nous, surtout l'humaine ou la vampire, et grâce à ma vue, je pourrai guetter la moindre fluctuation magique et les prévenir si quelque chose approchait.

Les secondes s'égrainaient les unes après les autres nous laissant dans un silence inconfortable. Scrutant le couloir devant moi, je pouvais entendre la voix de Pheare sans en comprendre un traître mot. Elle devait s'être rapprochée de la masquée ainsi que du nain. Ma préoccupation actuelle était davantage tournée vers Mina. Celle qui était revenue nous chercher sans que rien ne l'y oblige souffrait sans commune mesure. M'aurait on dit qu'un vampire peut ressentir autant de peine que j'aurais eu du mal à y croire sans le ressentir ici même. Néanmoins, et malgré l'horreur de l'instant, je redoutais ce qu'il adviendrait ensuite. Qui pouvait présager de la réaction de cette femme ? Elle parvint d'ailleurs à me surprendre car si je ressentis parfaitement la montée en puissance de sa colère... ou plutôt de sa rage, je ne m'attendais pas à ce qu'elle se jette sur Pheare ! Imprévisibles était un mot correspondant parfaitement aux deux femmes qui étaient devenues mes compagnes de fortune. Entre le double maudit de l’humaine et le comportement de Mina, j’étais servie.

-Par Azura, Pheare ! Lançais je en me précipitant instinctivement en direction de l’humaine assaillie.

Je dus néanmoins stopper mon élan lorsqu’un rugissement s’échappa de la vampire propulsant Duumkhar. Heureusement la gamine masquée s’était éloignée. Et alors que j’en étais à me demander comment je pourrais ne serait ce qu’attirer l’attention de Mina, une puissante explosion assortie d’un nuage de poussière se déclara à l’autre bout du corridor. Pas moyen d’y voir clairement avant de se faire éjecter derechef du coté du nain. Je pensais avoir percuté quelqu’un ou quelque chose en cours de route, déviant ainsi ma trajectoire. Et alors que je me relevais en hâte, quelque peu sonnée, une voix raisonna. La femme machine, Fidia, venait de faire son apparition. C’était mal barré, très mal barré même si elle était de la partie. Des souvenirs de notre première rencontre dans une salle de banquet affluèrent, avec pour résultat une grimace de dégoût teintée d'admiration ou du respect que je concédais à cette femme. Je fus néanmoins agréablement surprise de la voir sans son équipement. Néanmoins et malgré que ce fusse difficile à comprendre, elle s’en venait nous aider.

Je crus un instant qu’elle n’aurait pas le loisir d’agir avant qu’une certaine vampire ne se jette sur elle mais il n’en fut rien. Le sort de son amie en dépendait apparemment. Se pourrait il que cette naine soit en mesure de la sauver ? Le spectacle qui suivit fut saisissant. Les explications impliquant un retour en arrière dans la vie même de Viky étaient insensées !! Comment pouvait on maitriser une variable aussi compliquée que le temps ? Je mourrais d’envie d’en savoir plus, de comprendre tant ce mystère teinté d’une note quasi divine était fascinant. Il fallut pourtant se résoudre à la réalité, à savoir que l’amie de Mina était en vie, certes assommée relativement rapidement par cette dernière puisque remonter le temps était apparemment quelque chose dont on ne sortait pas indemne, mais elle était bien là. Et Fidia n’en avait pas finit. Un trou s’ouvrit brutalement à ma gauche, parsemant ma chevelure et mon visage de poussière. Pas moyen de lui dire un mot que déjà elle disparaissait, chargeant sa prochaine attaque qui promettait de faire table rase de cet endroit.

Déjà Shaileen s’approchait désireuse sans aucun doute de ne pas terminer sa vie ici même. Elle avait l’air surprise de trouver de tels souterrains. Pour ma part j’étais au-delà de la surprise, et à vrai dire du moment qu’il y avait une sortie je n’allais pas me poser la question de l’existence de ce dédale. Il était notre seul espoir, alors pas question d’hésiter. Je hochais simplement la tête à ses paroles. Passant une main sur mon visage, éloignant crasse, poussière et cheveux qui s’y étaient agglutinés je proposais mon aide à Pheare à qui il manquait encore une partie de… cordes vocales et passait sans hésitation le trou créé par la femme machine.

Mina portant son amie, Duumkhar guiderait sans aucun doute la masquée. De plus étant armé, il serait logique que le nain prennent se place en fin de file. De mon point de vue il était logique que l’humaine et moi passions devant si toutefois cette dernière était d’attaque. Mina pourrait tout aussi s'y prêter, cependant il valait peut être mieux qu'elle se concentre sur Viky qui pourrait se réveiller n'importe quand.
Il semblait n’y avoir qu’un chemin possible à suivre nous épargnant le loisir de choisir une direction. M’appuyant sur ma vision nocturne et sur les capacités de mes compagnons, je décidais d’avancer dans le dédale accompagnée par Pheare si celle ci avait besoin de mon aide ou était restée proche de moi. Il fallait s’éloigner rapidement d’après les dires de Shaileen, ce sur quoi je voulais bien la croire.

- Savez vous vers où nous dirige ce dédale ? Demandais je d'une voix forte, sans me retourner.

Ma question s'adressait logiquement au nain ainsi qu'à la fille puisque nous étions nous autres étrangères à ce lieu.
Puisque le moment était à la fuite autant savoir vers quoi nous avancions. Mon esprit était encore partiellement bloqué sur le miracle produit par la sphère de Fidia. Si leur technologie était capable de pareille prouesse, j'étais étonnée que les peuples des profondeurs ne soient pas devenus plus puissants voir n'aient pas fait surface. Mais la reine n'avait elle pas dit que les Belrins avaient été conçus en secret, reclus du reste du monde ? Et en moi même je commençais à douter de mon envie de quitter cet endroit. Certes y rester en qualité de chair à spectacle n'était pas pour me ravir et le roi nain était corrompu. Pourtant il me semblait que ces lieux avaient nombres de promesses à offrir. Rien ne m'attendait nulle part ailleurs, je ne me sentais chez moi ni en surface, ni parmi mon peuple. Et puis était ce réellement le mien si on ajoutait à cela le fait que j'avais été parachutée dans ce monde peu de temps auparavant ? Errer ça et là à la recherche d'un but semblait ce qui m'attendait si toutefois nous sortions un jour de ce bourbier dans lequel nous étions plongés. Secouant la tête afin de chasser ces pensées dont il faudrait m'occuper plus tard, j'essayais de me concentrer sur notre route.

Lorsque tout le monde eut franchi le trou creusé par Fidia, l'ensemble du groupe ne s'hasarda point à demeurer adosser à l'embouchure. La machiniste avait été parfaitement claire à propos de ses intentions, notamment celle qui consistait à vitrifier le corridor qu'il venait de déserter. Outre le son oppressant qui vrombissait dans la partie ombragée des geôles, l'énergie libérée ne serait pas sans conséquence si les gens se trouvaient trop proche au moment de sa libération. Le terme vitrifié échappait peut-être aux étrangères, mais pour Dummkhar, plus encore que pour Shaileen, le sens de ce mot avait une signification bien précise. Dans une poignée de secondes, une chaleur proche de la supernova aseptiserait chaque millimètre carré, provoquant également une fonte des matériaux les plus durs ! Bien qu'il connaissait les effets de la vitrification, le Façonneur n'avait pas encore eu l'occasion d'assister à une démonstration. En dépit de leur progression, le Balrin estima qu'ils n'étaient pas suffisamment éloignés du trou, et que l'effet du souffle ne manquerait point de les vaporiser. Ses yeux sombres ne pouvant percer les ténèbres qui obscurcissaient leur route, Dummkhar s'hasarda à demander aux étrangères qui manoeuvraient en tête si elles ne discernaient point une intersection, ou quelque chose s'y rapprochant ? La face de cauchemar s'exprima depuis les brumes aveugles du dédale, affirmant qu'il n'y avait qu'à filer tout droit. Sans attendre, le Nain arma son tromblon, puis visa le plafond friable qui surplombait le passage qu'ils venaient de franchir. A cette distance, la décharge de shrapnel serait assez imprécise, mais couvrirait suffisamment de surface pour espérer provoquer un éboulement.

Le rayon de Volta chargeait toujours, l'intensité était telle que le sol en vibra. Il fallait faire vite, étroit comme l'était ce boyau, nul ne pourrait survivre à une force énergétique de cette ampleur. Il arma son canon, puis fit feu dans la roche. Dans un effet de recul, la crosse du fusil heurta son épaule, le faisant choir sur son séant. Dummkhar dut agir dans la précipitation, se faisant, il ne bénéficia guère du temps nécessaire pour se positionner convenablement. Poreuse et usée par les siècles, la pierre déjà fragile éclata à l'impact, une poussière épaisse et ocre inonda les lieux, masquant le visuel du vacarme qui s'en suivit. Un bruit sourd maronna des hauteurs, un grondement semblable au tonnerre se faisant de plus en plus proche parvint jusqu'aux oreilles des protagonistes. Suivit d'un autre, et encore d'un nouveau. Se renforçant les uns les autres jusqu'à ce qu'un effondrement survienne à l'endroit même où le Façonneur avait frappé. Ainsi naquit l'expression : "Le ciel va nous tomber sur la tête" chez les Oubliés. Le son de la catastrophe correspondait à la chute des étages d'un immeuble depuis l'écoute de ses soubassements. Fort heureusement, l'éboulement se cantonna à la zone du trou. Néanmoins loin d'être certain que cela suffise, Dummkhar hurla à toutes de se jeter au sol. Un ordre qu'il s'écria bien quatre fois avant que le rayon de Volta ne soit libéré !


La main enserrant toujours sa gorge, Pheare entendit l'ordre du Nain, mais ne s'y résolut point. S'assurant d'abord que les autres s'allongent, la femme chevalier se préparait à plonger sur l'éventuel rebelle. A la quatrième sommation, elle était ventre à terre. L'humaine s'attendit à une explosion, mais il n'en fut rien. Lorsque la "vitrification" se produisit, l'atmosphère se contracta, et un vrombissement d'une puissance incomparable ébranla le roc qui la portait ! Sans même éprouver la moindre sensation de chaleur, sa peau se mit à suer à grosses gouttes. Le sable que saupoudrait le plafond s'écrasait sous forme cristalline tout autour d'elle. Prouvant ainsi que le Balrin avait bien fait de leur intimer cet ordre. Non pas que Pheare était versée dans la science, mais elle connaissait l'origine du verre, dont le processus nécessaire à son obtention. Le rayonnement sembla durer des heures, et quand enfin il eut cessé d'émettre, il n'y avait plus la moindre source de lumière. Sa vision nocturne était certes plus affutée que l'Humain moyen, mais cette dernière demeurait toutefois insuffisante pour être en mesure de discerner quoi que ce soit. Toujours aphone, la jeune femme était bien triste de ne pouvoir faire l'appel des personnes en présences. Aussi se contenta t-elle d'y aller à tâtons afin de s'assurer que tout le monde allait bien.

Sa respiration était bruyante et sinistre, en somme, elle avait tout du râle d'une personne âgée malade des bronches. Quoi de plus logique en même temps, avec la cavité que lui avait si gentiment creusé Mina ! Laquelle ne manqua point de manifester le fond de sa pensée... En soi, c'était la preuve qu'elle allait bien. Puis Pheare finit par toucher quelqu'un, elle n'avait aucune idée de qui cela pouvait être. Ne parvenant guère à identifier la partie de son corps qu'elle pétrissait, la jeune femme insista, au moins jusqu'à obtenir une réaction.


- Cinglée de ses morts !! Gronda le Vampire.

Mina s'était réellement jetée au sol à la sommation du nabot ? naaaaaan ! Et bien si. Soucieuse de l'état de santé de Viky, elle fut même l'une des premières à lui obéir. Balançant sa charge sur la roche, la prédatrice se coucha sur elle pour la préserver de tout danger. En se relevant, celle-ci constata par ailleurs que tout un pan de son cuir chevelu avait fondu, ce qui la poussa à injurier la machiniste. L'épaisseur du corps de Viky avait surélever sa couveuse, lui faisant ainsi subir une partie du souffle qu'avait engendré le rayonnement. La fibre capillaire des Vampires, à l'instar de leurs ongles, ne repoussaient pas. Et sa régénération n'était pas assez poussée pour colmater cette aération qui campait désormais sur l'arrière de son crâne. Bien que l'apparence importait peu aux yeux de Mina, elle avait bien conscience que la crédibilité dépendait en grande partie du charisme. Or, une calvitie de cette nature ne pouvait que la desservir ! Un souci de plus dont elle devra se préoccuper plus tard.

- Même si l'aboutissement de ce dédale se trouve être le sphincter de Kryos, nous n'avons guère de choix ! Fit savoir le Vampire après avoir replacé Viky sur son épaule.

Elle ne croyait pas si bien dire...

Une fois que tout le monde fut entrer dans ce long couloir qui ne m'inspirait rien de bon et que, par dessus tout, je ne connaissais absolument pas, la drow interrogea Dummkhar et moi-même sur cet endroit. Montrant une mine embêtée et haussant les épaules, je ne pourrai pas lui répondre autre chose que par la négative. Personnellement, me concernant, je n'avais jamais eu connaissance d'un tel dédale sous la capitale. Mais en soit, je n'étais pas surprise non plus d'en trouver un. Le contraire m'aurait plus étonnée.

- Je n'en ai aucunes idées ! Lui avais-je alors répondu, bien embêtée. Ca ne me rassure pas plus que vous... cela dit.

C'est aussi pour cela que je ne m'empressais pas non plus de passer au devant.  Bien que la puissance magique générée par l'amorçage du processus de vitrification était telle que j'avais l'impression d'y voir comme si j'avais récupéré la vue ! Le tunnel et le moindre de ses reliefs. Les silhouettes de chacune des personnes autour de moi, du moins, la partie faisant face à la source d'énergie. Même la vampire, je la voyais clairement. Tous les détails de leurs visages, la gorge déchiquetée de Pheare, je voyais absolument tout ! Cette ribambelle de détails me faisait comprendre à quel point on devait détaler rapidement d'ici et ce, sans nous retourner pour admirer. Quitte à terminer en vitrail. Mais même en y voyant si bien, sur le moment, je pouvais pas prendre le risque de diriger la fuite si jamais tout venait à être plus sombre d'un coup pour moi.  Mais s'il fallait que je m'y risque, je le ferai. Je n'avais certainement pas envie de mourir là, pas avant d'avoir retrouvé mon fils ! L'explosion qui allait surgir allait s'étendre sur une très grande distance et, de plus, comme nous étions dans des endroits clos, l'énergie allait être bien plus concentrée et canalisée que dans un terrain vague.

J'avais beaucoup entendu parlé des exploits de Fidia, même vus certains d'entre eux quand j'étais soldate pour repousser les vagues de monstres sorties de la Prugarass. Cependant, la vitrification, c'était bien la seule chose que je n'avais encore jamais vue. Mais à en entendre ce qu'il s'en racontait de la bouche de ceux y ayant assistés, c'était effroyables et d'une violence sourde. Limite si c'était pas l'arme la plus destructrice jamais déployée jusqu'à maintenant... me demandant si de telles choses pouvaient exister à la surface ou s'ils seraient tous pris au dépourvu par la puissance de l'armée Balrin si elle venait à s'extirper à la surface pour une quelconque raison ? Mais bref, ce n'était pas le moment de supposer sur de la géopolitique de comptoir ! On devait continuer d'avancer ! Je tenais toujours fermement la main de mon Dummy avant qu'il ne mette un frein net, me faisant presque m'étaler face contre terre tellement je ne m'y attendais pas au vu du contexte. Intriguée, je me retournait face à lui, m'apprêtant à lui demander si j'avais soudainement déteint sur lui et s'il avait hérité de mes tendances suicidaires.

Cependant, à peine eu-je le temps d'ouvrir la bouche qu'il s'adressait déjà aux inconnues. La vampire s'empressa de lui répondre, annonçant qu'ils n'avaient qu'à courir droit devant, ce que je ne pouvais que approuver au vu de ce que mon masque me permettait de constater.

- En effet. En avant toute ! Me permis-je d'appuyer par l'affirmative à la suite de Mina.

Me préparant à tirer à nouveau la main de Dummkhar pour reprendre notre course, je sentis cette fois-ci une résistance. Sentant cette dernière me filer entre les doigts. À nouveau stupéfaite, je me retournais et voyait le Balrin s'éloigner de quelques pas et s'équiper de son troublon. Oui, au vu de ce que je venais de comprendre sur ce qu'il allait faire... mon mental avait volontairement fourché sur le nom de son arme. Non mais oh ?! Se rendait-il compte qu'on pouvait terminé tous en crêpes à vouloir nous faire tomber le ciel sur la tête comme ça ?! Ce dédale avait tout pour être ultra anciens, le moindre coup violent allait le faire s'effondrer ! Tournant la tête en direction des autres et sur Dummy, à plusieurs reprises, j'étais prise au dépourvu. Complètement embarrassée. Etais-je la seule à avoir compris son plan ? Tout le monde était stoïque, visiblement partagé entre l'envie de partir ou de finir en statue de verre. Voyant Dummkahr pointer son arme sur le plafond, une montée de stress m'envahit même si j'avais toujours eu l'habitude de ses manières rustres et quelques peu dangereuses.

- T'es sûr de vouloir faire ça ? Commençais-je à lui demander, d'une voix toute petite, me préparant au bruit assourdissant qui allait me fracasser les oreilles. J'imagine que oui... Dis-je en voyant l'arme bien pointée sur le plafond. Oui, forcément. Lachai-je dans un soupir saccadé, me préparant à bouger si quelque chose dérapait. Évidemment que tu vas le faire...

C'est à ce moment là que le Balrin appuya sur la gâchette et que la détonation retentit dans tous le dédale. Les mains plaquées sur les oreilles, je pus m'épargner le plus gros du bruit et m'en protéger le plus possible. La silhouette du nain propulsée au sol, direct sur les fesses. Autant vous dire que j'en aurai ris à gorge déployée si le contexte avait été différent mais là... aux suites des craquements au-dessus de ma tête, je ne pouvais que reculer de plusieurs pas, à la suite du nain, le plafond s'écroulant devant nous. Dégageant un énorme nuage de poussière qui vint m'irriter la gorge. M'étouffant, toussant sans relâche, ayant respirer complètement de travers. Et c'est là que mon regard fut captivé par l'énorme source d'énergie qu'était en train d’emmagasiner Volta. L'éclat qu'il émettait au travers de mon masque, filtrant au travers d'un nuage de poussière dense, m'aveuglait mais m'agressait pas les pupilles pour autant. C'était une lueur certes annonciatrice d'un désastreux désastre imminent mais, je ne sais pas, quelque chose d'apaisant en sortait aussi. Ma curiosité maladive voulait s'en approcher, saisir cette chose et la figer dans le temps afin de la conserver et l'étudier. Perdant, l'espace d'un court moment, la notion du danger qui planait sur nos têtes. Heureusement que Dummkhar hurla à plusieurs reprises de tous nous allonger au sol parce que, je vous jure, je ne serai pas sortie de ma léthargie contemplatrice s'il ne l'avait pas fait !

Sursautant sur le quatrième avertissement, mon corps tout entier se mit à frissonner. Ma respiration se bloquant. Une sensation étrange parcourait tout mon corps, ni chaude, ni froide, le faisant suer à grosses gouttes. C'est là que d'un coup, d'un seul, je laissais mes jambes faire et me jeter au sol, peu importe comme j'allais atterrir. Parce que à la seconde d'après une onde de choc me passait au-dessus de la tête, suivi d'un son assourdissant. Un énorme vrombissement faisant trembler le couloir entier, me vrillant les tympans. Faisant vibrer mon corps tout entier. Décrochant des débris du plafond qui tombèrent tout autour de nous, transformés en cristaux. Ne pouvant alors clairement pas me mouvoir plus que ça au risque d'en perdre ma tête, j'espérais juste qu'aucun bout du plafond viendrait m’aplatir pendant ce laps de temps. Apercevant Dummkhar tout près de moi, je tendis ma main gauche pour saisir son épaule afin de m'assurer qu'il était bien là, tentant d'alléger la peur qui m'habitait. Une lueur éclatante, entièrement blanche, illuminait tout le couloir par-dessus les roches tombées au sol, nous offrant une protection suffisante. Sans lui, j'émettais un sacré doute sur le fait que l'on s'en serait alors sortis indemnes.

Quant bien même tout cela semblait avoir duré une éternité, tout c'était passé si vite que je serais incapable de pouvoir expliquer ce qu'il s'était passé ni le ressentis que j'en avais eu. Plaquée face contre le sol, je sentais les dernières couche de poussière retomber doucement sur son mon visage et se mélanger aux gouttes de sueurs qui glissaient toujours sur ma peau. Le cœur frappant fort contre ma poitrine. Si fort que la planète pouvait le ressentir. Ma main crispée sur l'épaule du Balrin, les pensées figées dans le temps, me posant en boucle la même question « Suis-je vivante ? Dummy est vivant ? » sans quitter sa silhouette du regard.

Je n'étais attentive à rien. On aurait pu me crier dans les oreilles, je n'aurai même pas bronché. J'étais juste là, à attendre que Dummy bouge ou dise quelque chose. Ma main se crispant de plus en plus fort sur son épaule. J'attendais seulement un mouvement de Dummkhar pour pouvoir reprendre mon souffle. Ne clignant pas des yeux, sentant qu'ils commençait à me piquer. Le souffle retenu depuis plusieurs longues secondes, je pouvais m'auto asphyxier si le Balrin venait à ne pas réagir. Mais soudains, quelque chose me sortit de ma torpeur. Me faisant sursauter comme jamais, lâchant un cri strident de surprise, ma main droite attrapant ce qui venait de me faire revenir à moi.

Cinq autres secondes me seront nécessaires pour me sortir de ma paralysie pour réaliser que des mains me tripotaient les fesses. De manières bien insistantes en plus ! D'un mouvement brusque, je me retournais, assisse, pour faire face à la personne qui pratiquait ces palpations fessières : C'était Pheare? Oui évidemment, je reconnu son aura et la légère silhouette que je pouvais apercevoir d'elle grâce au résidu de l'énergie encore présente dans l'air. S'estompant petit à petit, me faisant revenir à la réalité de ma cécité. Je me saisis des mains de l'humaine, me mit à genoux, penchée face à elle, le visage tout près du sien.

- Je crois que ces mains là vous appartienne... Lui avais-je susurrer tout bas, de manière quelque peu douce et amusée.

Une fois que j'eus rendu les mains baladeuses à sa propriétaire, je me reculais timidement, sur les genoux et m'approcher de Dummkhar pour m'assurer qu'il allait bien. Me mettant à ses côtés, une main posée sur son torse, je le secouais doucement. Son cœur battait et sa respiration normale, j'étais soulagée. Ma main remontant jusqu'à se poser sur sa joue, l'autre passant derrière sa nuque, je laissait un long et sinistre soupire m'échapper avant de le relever et le prendre dans mes bras. Le serrant si fort.

- T'es complètement cinglé ma parole ! On a failli se prendre le ciel sur la tête  Je ne suis pas faite pour ressembler à une crêpe... Commençais-je à râler, tremblant légèrement à l'évocation du souvenir de cette explosion effroyable et magnifique à la fois. Mon visage plongé dans sa nuque, je parvenais à calmer les tremblements qui parcourait tout mon être. Mais c'est pour ça que je t'ai dans la peau...

La respiration contrôlée, je m'empressais de saisir son visage entre mes mains et maladroitement tâtonner dessus pour le défaire de la poussière qui l'envahissait sans me rendre compte si cela était efficace ou non. De l'extérieur, cette scène était peut être incroyablement stupide mais il savait ce que j'étais et comment je réagissais et, surtout, à quel point j'étais attachée à lui. Des réactions parfois disproportionnées suivant la situation mais là, clairement, sans lui, on y passait tous. Venant à peine de réaliser cela, j'étais assaillie de multiples pensées. Toutes autant angoissantes que réjouissantes. Mais des râleries lointaines me firent revenir à la réalité. Mina venait de se manifester, Fidia se prenant même une petite crotte de nez au passage par quelques injures jetées par cette dernière. J'apercevais aussi Ydris revenir à elle, non loin de moi. Mes mains quittant doucement le visage du Balrin, je vins déposer un baiser tendre sur son front, prise d'une timidité certaine au vu de la scène que je venais de déployer.  

- Hm... désolée. J'étais morte de peur.

Alors qu'un sentiment d’apaisement s'installait en moi, avant que la vampire vienne rajouter une couche, je réalisais à nouveau dans quelle galère nous étions. Coupés du monde, dans un vieux dédale dont je ne connaissais rien, ni même son existence. Le silence était si pesant et nos voix rebondissaient dessus d'une manière si sinistre. Quelque chose ne me plaisait pas ici... Mais... attends... quoi ? Le sphincter de Kryos ? Ce n'était pas la pire des prévisions qu'il soit de cité ce dieu là précisément ?! Enfin, désolé Kryos mais, du peu que je connaissais de lui, il était pas connu pour être un bon partenaire pour cueillir des pâquerettes.

- J'espère qu'il n'a pas deux pieds gauches Kryos... Murmurai-je en me relevant doucement. Constatant que, définitivement, j'étais redevenue complètement aveugle et handicapante pour le groupe.

Mais mes oreilles, elles, fonctionnaient bien encore. L'acouphène s'étant légèrement atténué, je pu entendre à nouveau correctement. La première chose qui me frappa était une respiration bruyante et sifflante. Mon regard fuyant, venant se déposer sur la silhouette de Pheare que j'apercevais toujours à mes côtés grâce à son aura, même si limite discernable, me fit me rappeler la vilaine blessure qu'elle possédait au cou. Faisant mine d'observer mes mains, les tapotant sur mes vêtements pour en dégager la poussière accumulée et les larmes que j'avais brièvement essuyée, je m'approchais doucement de l'humaine. Tapotant tout doucement sur son épaule gauche et de interpeller tout bas.

- Je... euh... Hm... comment dire... Ma voix chevrotante, je cherchais mes mots pour ne pas formuler cela de manière trop étrange. Si vous voulez... enfin, si vous êtes d'accord... Je peux tenter de soigner votre plaie... ce trou au cou... Je... m'y connais un petit peu en soin magique alors... si vous êtes d'accord, laissez-moi faire. Ou pas, comme vous le voudrez...

Évidemment, je n'allais pas m'imposer et la forcer à accepter que ma magie l'envahisse pour la soigner. J'attendrai qu'elle accepte ou non et je m'y essayerai. Peut être arriverai-je à la soigner complètement ou, au pire, juste refermer la plaie et qu'elle puisse cicatriser normalement ainsi que de retrouver l'usage de la parole surtout, elle semblait désespérément le vouloir. Mais dans le cas où elle accepterai, j'allais juste me placer à ses côtés, posé une main sur le haut de son dos et délicatement déposer l'autre main droite sur sa plaie pour laisser mon sort agir. J'étais bien consciente que ce dernier n'avait qu'une seule et unique cartouche et qu'il disparaîtrait ensuite. Mais quoi qu'il en soit, Pheare devait être au mieux de sa forme. J'avais la trouille de ce dédale et de ce que l'on pourrait y trouver. Je préférerai donc que l'humaine soit soignée plutôt à que l'on compte sur moi, qui suis le boulet du groupe, pour réagir à une attaque. Je ne dis pas que je suis incapable pour autant mais, à parier, Pheare valait dix moi-même réveillée facilement... Mais je ne pouvais qu'attendre et espérer une réponse positive. J'avais pleinement confiance en ma magie pour la soigner et j'étais persuadée que sa blessure disparaîtrait en très grosse majorité.

Bien évidemment personne ne savait vers où se dirigeait ce dédale, s'eut été trop facile sinon. Il n'y avait donc qu'à avancer tout droit pour échapper à cette vitrification, quoi que ce fusse. Venant de Fidia je pouvais imaginer un rayon d'énergie, ou encore une force à même de faire s'effondrer une partie des tunnels. Ce terme m'étant totalement inconnu j'avais le choix et pourtant étrangement, je n'avais guère l'envie de rester afin d'en découvrir le sens. La voix du Belrin recouvrit bientôt  le vrombissement grandissant qui n'en finissait plus, l'espace d'une phrase. Il demandais si nous approchions d'une intersection ou quelque chose s'en approchant. A vu de drow aucunement. Le tunnel continuait de filer droit aussi loin que je pouvais observer. Je m'arrêtais afin de me retourner pour lui répondre qu'il n'y avait qu'à avancer car le dédale se poursuivait sans courber, ce qui ne sembla lui convenir. En effet il mit un terme à sa propre avancée et, malgré les protestations de la jeune masquée, il tourna son arme contre le plafond avant de faire feu.

Je l'avoue sans crainte, ma première pensée à cet instant fut de maudire le nain. Je ne tenais pas spécialement à me faire engloutir par ce qui nous servait actuellement de plafond. Cependant en mon fort intérieur je savais que Dummkhar n'agirait pas sans une dose de réflexion. S'il tirait, c'était qu'il en savait bien plus que nous sur l'opération lancée par Volta et qu'il craignait pour notre survie, en tout cas suffisamment pour risquer d'ébranler le tunnel environnant. S'en suivit un vacarme indescriptible. Enfin pas tout de suite. Nous eûmes droit au calme avant la tempête, ce court laps de temps où les événements se produisent presque au ralenti, où le son semble s'amoindrir et le temps se courber. De profonds grondements de plus en plus proches se firent entendre, la poussière masquait totalement tout visuel sur la situation. Au milieu de tout cela surgit la voix du nain nous hurlant de mordre la poussière. Une fois. La question du "pourquoi" me traversa bien l'esprit. Deux fois. La vitrification se rappela à mon bon souvenir.  Un regard sur les autres, chacun réagissant à sa manière, plus ou moins rapidement. Trois fois. Agir d'abord et réfléchir ensuite, voilà qui était une idée formidable sur l'instant, je me jetais donc au sol. Quatre fois.

Je m'attendais à une détonation, un effondrement,... quelque chose en somme.  Pourtant le résultat fut tout autre. La moiteur, la poussière crystalline qui s'amoncelait sur et autour de moi, tout suggérait une chaleur que je ne ressentis pas. Cela sembla durer à la fois une éternité et court instant. très paradoxal comme ressenti. Le fond sonore présent depuis que nous avions quitté les cellules s'était tu. Les ténèbres entouraient les lieux. Je ne tardais pas à me relever, un peu étourdie, pas certaine que tous mes sens soient intact. Un bourdonnement persistant s'était logé dans mes oreilles. Heureusement, ma vision était toujours aussi bonne, ce qui me permit de constater après m'être rapprochée et avoir regardé autour de moi, que tout le monde était vivant. Plus ou moins bien portant, certes, mais c'était toujours ça. Mina ne tarda d'ailleurs pas à se manifester ce qui ne manqua pas de remonter légèrement l'une de mes fossettes. Shaileen n'était pas en reste déversant sa colère, ou était ce sa peur ? sur son compagnon.

Je voulus m'enquérir de Pheare, la sachant désavantagée en l'instant de par sa vision et sa blessure. J'imaginais sans mal, à défaut de l'entendre, sa respiration sifflante et rauque. Je toussais moi même à quelques reprises et secouait cheveux et vêtements. La masquée m'ayant devancée, je les laissais s'entretenir et portais attention aux paroles de la vampire. En effet, il nous fallait continuer peu importe ce que nous allions trouver sur notre chemin. L'identité de ce Kryos m'échappait mais sur l'instant je n'y portais aucune attention. Portant mon regard au delà de notre troupe vers l'éboulement d'où nous arrivions, je reconnus sans mal que la puissance de Fidia était incomparable. Mieux valait ne pas traîner dans les environs. Si les deux habitants des tunnels ignoraient l'existence de ce passage, ce n'était peut être pas le cas de tout le monde. De plus, qui savait si la roche fragilisée autour de nous n'allait pas venir à se rompre.

-Nous ferions mieux d'avancer si tout le monde est sur pied, énonçais je finalement, les environs sont certainement instables.

L'épisode de la vitrification n'était pas encore terminé que Pheare souhaitait déjà en occulter le souvenir. Pour une Dame de sa trempe, il était difficile d'accepter le fait d'avoir eu la main baladeuse. L'Elfe ne s'en offusqua point, et nulle arrière pensée ne guida son geste, si ce ne fut la tromperie de l'obscurité qui noyait le corridor. Et pourtant, la jeune femme ne parvenait guère à s'en défaire. Celle-ci avait pourtant conscience que dans la folie de l'instant, en plus d'être privée d'une partie de ses sens, le hasard pouvait avoir des tendances douteuses. Mais en dépit de ce savoir, ajouter au fait de ne pouvoir s'excuser par la voix, une gêne sans nom pouvait se lire sur ses traits. Puis après un temps qui lui sembla beaucoup trop court, Shaileen se présenta de nouveau à elle. D'humeur charitable, l'Elfe se proposait de la soigner au moyen de sa magie. Une demande qui fit écho dans son esprit embrumé, à savoir que le jour de leur capture, Ydris lui soumit une requête pour le moins similaire, et ce, peu de temps après qu'elle se soit faite écrasée par la machine de Fidia. En réponse, Pheare pinça des lèvres tout en agitant les mains devant elle afin de marquer son refus. Quand tout-à-coup, celle-ci se souvint du masque qu'elle portait, et que même dans le cas où ses yeux seraient en parfait état de fonctionnement, ce dernier la priverait de tout visu. Aussi agita t-elle des bras en direction de son compagnon dans le fol espoir que celui-ci lui retranscrive sa gestuelle.


Malgré sa vision nocturne, Mina ne parvenait à discerner l'extrémité du couloir tant il s'étirait. Aussi, après avoir sommairement répondu à Ydris, le Vampire se retourna. Voyant alors Pheare gesticuler devant le nabot, sans que ce dernier ne lui accorde une once d'attention, la prédatrice coupa sèchement la suggestion de la Drow par un puissant grognement. Trop de temps avait déjà été perdu, et alors qu'elle devrait filer en direction de la surface avec les étrangères à sa suite, voilà qu'elle arpentait les chiottes de la cité en compagnie d'un tas à la démarche de guingois, et d'une asperge causante complètement miro ! Plus question pour elle de tolérer le moindre accroc maintenant que la situation avait retrouvé un semblant de normalité.

- Fermez-là ! Ponctua Mina après que son grondement ait cessé. Pheare n'a guère besoin de ton incompétence pour se restaurer, cesse donc de l'importuner ! Puis se tournant vers Ydris, celle-ci ajouta : Quant à toi, au lieu de parler pour ne rien dire, tâche d'être sa langue, des fois qu'elle aurait une idée quelconque à nous communiquer ! Toujours accompagnée de sa charge ainsi que de cette brise insolente qui caressait l'arrière de son crâne dégarnie, Mina accosta le nain. Qu'est-ce donc que cet endroit qui fut emmuré ? et où mène ce boyau ?!


La miss pouvait bien rouspéter, Dummkhar ne demeurait pas moins convaincu de la décision qu'il eut pris. Il fallut agir vite, et sur le moment, son coup de canon lui parut être une bonne idée. Par ailleurs, la survie de tout ce beau monde confirma le bon fonctionnement de son ciboulot. Pour Dents-pointues en revanche, pas question de perdre le filon. En dépit de la situation dramatique qui s'imposait à eux, cette femme refusait de s'envoler pour les sept lieux. Le Façonneur en avait connu des personnes terre à terre, mais celle-là les surclassait en tout point ! Manifestement habituée à battre la plaine en compagnie de la mort, rien ne semblait troubler l'arracheuse de gorge, si ce n'était la perte de la femme qui campait sur son épaule. La chaleur résiduelle du goulet permit à son infravision de déceler sa froide silhouette, et c'est à celle-ci qu'il répondit :

- J'ai bien une vague idée... Marmonna le Nain la voix pleine d'incertitudes.

- Alors accouche ! Rétorqua la prédatrice en le tirant du sol pour le remettre debout.

- Ôtez vos doigts crochus de mon pourpoint ! S'insurgea Dummkhar. Ce n'est pas aussi simple que cela. Reprit-il après qu'elle l'eut lâché. Les archives dont regorge le Façonnat sont extrêmement disparates lorsqu'il est question de notre histoire.

Le Belrin était passionné de chroniques ancestrales, si bien qu'à défaut de mieux, il se résolut à écrire un livre pour relater chacun des faits historiques qu'il avait pu lire. Fatigué d'éplucher les feuillets du Façonnat tout juste bons à donner la migraine, Dummkhar se consacra entièrement à son recueil dont il faisait désormais un devoir. Shaileen bien trop occupée à inspirer Sinah, et lui tourmenté par la perte de leur enfant, cet ouvrage devint pour ainsi dire, sa seule et unique vocation. Malheureusement, l'évènement actuel ne figurait point sur son agenda du jour, aussi le livre inachevé demeura auprès de son lit. Ce fut pour cette raison que le Façonneur eut besoin de quelques instants de réflexions afin de réunir ses souvenirs.

- Alors ?!! S'impatienta le Vampire.

- Oui, oui... oui. Le dernier "oui" fut murmuré, laissant comprendre que le Belrin avait mis le doigt sur quelque chose.

- Bien, alors causons en marchant. Mais que ton effrontée ferme la marche, je n'ai pas envie de l'entendre plus avant ! Malgré la fermeté de ses mots, Mina n'avait point insulté Shaileen. Qu'elle ne se méprenne point, il ne s'agissait guère de respect, mais plutôt de sens tactique. Pheare, tu seras ses yeux !

- Non ! elle reste avec moi ! Rétorqua farouchement Dummkhar. Vous avez votre groupe, j'ai le mien. Nous ne sommes alliés que par les circonstances. Vous voulez survivre ? Tant mieux, nous aussi, alors nous nous accoutumerons les uns des autres.

Elle aura essayé. Mina n'était pas d'humeur à la querelle de bas étage. Elle vit une opportunité d'écarter cette écervelée à la voix exaspérante, elle la tenta, rien de plus. Grognant pour faire savoir qu'elle n'avait rien à ajouter, tous purent se mettre en route. Dès qu'il fut certain que Melle Dents-pointues en avait fini avec sa dulcinée, le Belrin entama le récit d'une histoire que même Shaileen ignorait.

- Nous venons de franchir une frontière invisible. S'annonça Dummkhar. Nous ne sommes plus dans les bas-fonds de Rozmiar, mais dans une des capillaires de l'ancienne mais non moins imposante ; Tar'Sen. Durant l'ère du Quartz, notre peuple prospéra dans une cité qu'il nomma "Tar", signifiant "Roche" dans notre langue. Puis un jour, une galerie de trop fut creusée. De la pierre fendue s'extirpa une horde de démons assoiffés de sang. Nous découvrîmes dans les mois qui suivirent l'existence d'une porte que l'on baptisa : Prugarass. "La bouche de l'Enfer". Se rendant compte qu'il parlait comme s'il faisait parti de cette histoire oubliée, Dummkhar se reprit. Pardonnez-moi, j'ai tendance à trop m'impliquer lorsque j'évoque...

- Je me fiche bien du pronom dont tu fais l'usage, raconte ! c'est tout ce que je te demande ! Ordonna Mina sans se retourner, ni même ralentir sa marche.

- Oui... bon. Désemparé, mais néanmoins ravi, le Belrin poursuivit. Quand l'art de la guerre fut maitrisé, et que l'on fut capable de repousser cette vermine démoniaque, le suffixe "Sen" fut ajouté au nom de la cité. Ensemble cela donne : "Roche glorieuse". La fierté de Tar'Sen ne dura hélas qu'un temps, et alors que nous étions sur le déclin, l'avènement des Oubliés s'en vint tout chambouler. Notre bon Roi Sildar refusa néanmoins de les abandonner à leur sort. Il fit donc agrandir Rozmiar, qui à l'époque, représentait notre "extérieur", elle était la Géode qui jouxtait les mines d'Astryum. De là, un nouvel âge débuta, l'ère Calcaire. Tout comme cette roche, nous étions fragiles, érodés, au bord de la dissolution. Cette introduction permit à Dummkhar d'aborder le sujet qui le préoccupait. Puis Fidia est arrivée. Son talent pour la chimie et les engins nous permirent de reprendre notre souffle.

- Oui oui, tout ça est vraiment très intéressant. Dédaigna Mina. Dis nous plutôt ce qui nous attend au bout de cette capillaire !

- J'y viens, ne m'interrompez plus je vous prie. Grommela le Nain. Chez nous, ce qui a été abandonné mais demeure encore, se nomme : Kaig. Quand Tar'Sen fut détruite par nos ennemis de la première heure, Fidia insista pour qu'on ne détruise point ce tunnel. Longtemps il demeura accessible, jusqu'à la construction des geôles ou il fut emmuré. Il y a fort à parier que le passage mène jusqu'au Kaig de Fidia.

- Quelque chose m'échappe. Cracha la prédatrice. Si ta jolie histoire est vraie, pourquoi ce couloir est-il aussi vide ? aseptisé de toute présence, d'ossements, ou même de stigmates sur les murs ?

- Comme vous avez pu le voir Madame, nos défenses pour juguler les assauts de Prugarass ne se trouvent pas dans les geôles. Nous n'avons jamais rien eu à craindre des démons de ce côté là. Ce qui me laisse à penser que le système de défense du Kaig fonctionne encore. Ce qui explique aussi le fait que ce soit Fidia en personne qui nous ait ouvert ce passage. Elle savait où cela nous mènerait.

- Oh par pitié ! épargne moi ça, il y a bien des lunes que je ne suis plus une dame, appelle moi Mina ! Corrigea le Vampire. Et j'imagine que ce système ne fait pas la différence entre démons et primates ? Finit-elle par se moquer.

- On peut le supposer en effet.

- Pourquoi n'étais-tu point là ? ceux de votre espèce semblent vivre vieux.

- Si vous estimez que cent-trente ans c'est vieux, je crains que cela ne suffise point pour remonter jusque là. Surtout que moi, du haut de mes modestes quarante-quatre galets, je suis loin de faire le poids à côté de la longévité des Oubliés.

- Alors pourquoi votre jean-foutre de Roi, et Fidia figurent dans ton histoire ? Serais-tu en train de te payer ma tête ?!

- Nenni ma... Voyant ses yeux éclairer les orbites de son visage, Dummkhar se rattrapa. ...na, avez-vous vu les cornes sur le crâne de Fidia, ainsi que la couleur de ses prunelles ? Vous la trouvez très représentative de notre race ? Durant l'ère Calcaire elle le fut, mais peu après la Confrontation, la machiniste fut débordée et dû se replier. Sauf que son seul point de repli se trouvait être Prugarass. On ignore comment, mais elle réapparut treize cycles plus tard dans un piteux état. Les sages de l'époque ont supposé que Fidia fut irradiée par l'énergie démoniaque qui alimente le portail. Des mutations émergèrent de son corps. Et alors qu'elle semblait condamnée à une mort certaine, sa vie fut au contraire prolongée au-delà du naturel, à l'instar de notre Roi. Dans les deux cas, la magie démoniaque en est la cause.

L'air encore sous tension après la vitrification par Fidia, ma vision s'étant finalement complètement éteinte, je ne faisais que patiemment attendre la réponse de mon interlocutrice. Mais quelque chose me percutait soudainement... Je me souvins qu'elle était muette et moi aveugle. Ce serait un peu compliquer pour se comprendre... Venais-je donc de déclencher un dialogue de sourd ? Soufflant du nez en me rendant compte de ma négligence, me grattant l'arrière de la tête avec un souris gêné, je fus prise d'un éternuement soudains de par la poussière cristalline qui voletait toujours dans l'air. Me frottant le nez qui me piquait désormais, je voulu reprendre la parole. Afin de lui dire de me taper le bras en fonction de sa réponse, lorsque j'entendis des mouvements rapides et du tissus qui se froissait brusquement. Comme si quelqu'un s'agitait dans tous les sens... Je tentais de décrypter avant qu'une voix cassante vienne me vriller les tympans et secoua la tranquillité presque anormale dans lequel nous baignions tous. Ce n'était évidemment que la vampire qui continuait donc de brailler dans tous les sens et m'indiquait donc de me taire et laisser l'humaine tranquille. Soit... Penchant la tête sur le côté, j'affichais une mine contrariée et boudeuse à la tirade de Mina qui s'en venait retranscrire le message de Pheare. Ce à quoi je lui répondis simplement :

- Oui maman... Lui lâchai-je d'un ton désinvolte, déçue de ne pas pouvoir aider. Soupirant longuement, les mains sur les hanches. Désolée de vous avoir gênée. Lui disais-je par politesse à l'humaine.

D'autant que visiblement, je n'étais pas la seule à m'en prendre pour ma pomme, même Ydris se faisait sermonnée. Après tout, que ce soit sa nature à Mina d'être constamment ainsi, je ne pouvais pas le lui reprocher de l'être. Du moins, actuellement, au vu de l'état de son amie que Fidia avait ramené à la « vie ». Car en temps normale, je n'aurai eu aucunes gênes à lui opposer un peu de résistance et qu'elle change de ton. Mais bon... Pour le moment, ce n'était pas la bonne solution. Supporter était le mieux à faire. Surtout que je me doutais bien que Dummy allait devoir réparer les pots cassés et avec un tel énergumène que cette vampire, il allait pas vraiment pouvoir me recoller moi si je dépassais les bornes. Néanmoins, j'avais quand même ce petit truc au fond de moi qui voulait juste la picoter un peu que je réussissais à retenir pour le moment. C'est alors là qu'une odeur très faible de brûlé me parvins au nez, un léger courant d'air soufflant dans ma direction. Ayant une bonne mémoire olfactive, je pouvais à peu près être sûr qu'il s'agissait de cheveux brûlés mais incapable de savoir d'où cela provenait.

Cependant, sortant de mon errance par la prise de parole du Belrin, je suivais la conversation qui venait de débuter d'une oreille, trop captivée par cette odeur que j'avais sentie. Soucieuse de savoir si cela provenait de moi, je n'avais de cesse de passer mes mains dans mes cheveux. Palpant chaque zone de mon crâne. Agrippant mèche par mèche et m'assurant qu'aucunes d'elles n'avaient été raccourcie. Cela ne donnait rien pour le moment et ce, en m'approchant doucement de Dummy, je sursautais alors à la soudaine sortie de Mina. Parce qu'en effet, trop aspirée par ce nouvel intérêt, j'avais pas réalisé qu'elle s'était rapprochée de mon cher. J'entendis alors un mouvement lourd mais rapide, ainsi qu'une réponse sèche et clair de Dummkar. Ne voyant clairement rien à ce qu'il se passait, je pouvais au moins les localiser devant moi, plus ou moins. Ils étaient proches mais que pouvait bien faire Mina à mon Dummy ? J'estimais que j'aurai pu intervenir en me calant entre ses deux là mais n'avait aucunes idées de à qui je ferai réellement face. Pire même, je pourrai mal juger leurs positions et me manger un mur. Et puis, au vu de comment le déroulé se poursuivait, je me rendis bien compte qu'il gérait la situation. Mina n'avait nul intérêt à nous réduire en charpie. Surtout si elle ignorait ce qui pouvait rôder à l'extérieur.

À nouveau, cette petite odeur discrète revint me hanter les narines et je compris alors que la source n'était autre que la vampire elle-même ! Pourtant, je n'étais guère dotée d'un odorat puissant ou que sais-je encore. Mais j'avais été marquée par cette odeur, ne serait-ce que lors des diverses batailles menées contre les démons. Il n'était pas rare que l'odeur de brûlé surviennent pendant les assauts. Parmi les tissus, métaux et autres matières organiques, ce fut celle des cheveux qui me restait dans le nez. J'avais déjà dû à plusieurs reprises me raccourcir la tignasse afin de me débarrasser des pointes brûlées une fois que les luttes acharnées s'étaient arrêtées. Prenant particulièrement soin de ma chevelure à ce moment là. Tout autant que cela pouvait être futile. Depuis lors, ils étaient toujours taillés au-dessus des épaules. L'époque où ils me tombaient jusqu'au bas du dos me manquait un peu, je l'avoue mais... ce n'était pas pratique du tout dans les activités de minage que j'avais avec Dummy dans nos temps libres.

C'était donc pour cela que actuellement, dépourvue de ma vue sur la scène et leurs silhouette, me doutant alors qu'il faisait entièrement noir, j'étais obsédée par cette odeur et fouillait sur mon crâne. Ce n'était pas pour autant que je n'écoutais pas ce qu'ils s'échangeait tous. Mina menait la vie dur à mon nain mais ce dernier en avait vu des biens pires. Il restait courtois, là où je n'aurai eu de cesse de n'être que l'insolence incarnée. Au moins, il prenait pas le risque de terminer en casse croûte. Ce à quoi je décidais alors de joindre mes efforts aux siens en me taisant et restant à ses côtés. Même si la vampire protestait alors à ma présence au devant de la petite troupe, mon cher n'en avait cure de son avis, la tenant en respect. Ce à quoi je me rapprochais un petit peu plus de ce dernier, étant un peu provocatrice tout en respectant pour le moment sa volonté de ne pas m'entendre. Là où quelqu'un pourrait dire que j'étais folle de provoquer une vampire au caractère aussi trempé et bestiale que celui de Mina, moi je rétorquerais que non, c'était juste de la fascination envers elle et un certain intérêt que je lui vouais.

Ce fut seulement alors que je me retrouvais satisfaite que ma coiffure n'avait pas été abîmée que je lançais toute mon attention au récit que venais de débuter Dummkhar. Pensant que j'allais pouvoir apporter ma pierre à l'édifice en y rajoutant des détails qu'il oublierait, je perdais pieds dès le début. Je me doutais bien qu'il y avait des choses que j'ignorais mais de là à être complètement à côté de la plaque à ce point éveilla mon intérêt comme jamais. Je me laissais noyer dans ses mots que j'écoutais attentivement. Bon, pour retenir tout ces nouveaux termes, il allait falloir me raconter à nouveau mais je faisais de mon mieux. J'étais loin de pensé que l'histoire du peuple Belrin était aussi ancienne. Je me doutais aussi bien que depuis que nous étions arrivés ici bas, nous étions un minimum filtré sur les informations qu'on pouvait obtenir. Nous donnant accès au minimum requis afin de pouvoir vivre en harmonie avec eux. Ça devait en frustrer plus d'un mais moi, cela ne me posait aucuns soucis. J'avais rapidement préféré m'enfermer dans mes songes et découvrir les choses de mon côté afin de me rendre utile sur l'instant présent. Que ce soit auprès de ma famille adoptive qu'avec Dummkhar. Peut être aurais-je dû finalement être plus présente...

L'histoire me passionnait même si j'étais partagée entre la crainte et l'enjouement à la découverte de celle-ci. Bien que mon cher précisait qu'il n'y avait rien à craindre des démons ici, qu'ils n'avaient jamais eu à s'en méfier de ce côté de la ville, j'étais quand même sur mes gardes. Seul bémol : Mina. Elle n'avait de cesse d'interrompre son récit. Ce qui avait le don de me tiquer un peu et bien que je voulu lui rendre la pareille en lui demandant de se taire, je parvins à faire l'effort colossal de prendre sur moi à nouveau, ma main droite cachée dans mon dos, serrant le poing quelques secondes et me faire passer l'envie. Dummy parvenait à instaurer un climat de confiance, petit à petit, en usant des bonnes ficelles. Si j'en venais à l'agresser soudainement... j'en perdrai un bout de ma cervelle. Je tournais la tête alors, tendant l'oreille sur ma droite pour distinguer les pas de Pheare et Ydris. Quant à moi, je me contentait de trottiner derrière mon nain.

- C'était donc pour ça... Me murmurai-je tout bas, à la fin du récit sur la pilote du robot géant, lors de son retour parmi les siens.

Ainsi donc, c'était ça l'origine des cornes de Fidia et la longévité du Roi ? Juste de l'énergie démoniaque du puits des enfers ? Je m'étais toujours posé la question sur la provenance des cornes de la machiniste. Le peu de fois que je l'avais côtoyée, je n'avais jamais été aussi près d'elle que dans ce couloir tout à l'heure. Ni même je n'avais pu lui parler directement. Mais ce détail particulier était impossible à louper, même en se tenant loin d'elle. J'avais de l'admiration pour elle. Me targuant intérieurement d'être tout aussi capable qu'elle, un jour, de construire une machine pouvant réduire la sienne en miette. Sauf que mon procédé était probablement de la triche vu que j'avais tous le temps que je voulais dans mes rêves et accès à ce que je voulais... donc souvent, j'aboutissais à des constructions bien impossible à concrétiser dans le réel. J'eus même envie de lui soumettre des améliorations que j'avais élaborée mais jamais je ne m'étais osée à cette prétention. Même en anonyme. Je ne me sentais pas du tout à ma place pour ces choses là, supposant qu'elle avait déjà tout testé et qu'elle devait avoir une cohorte de nains talentueux avec elle. Cependant, je gardais en tête tout cela, si un jour une telle chose pourrait se présenter à moi.

C'était alors que le récit touchait à sa fin. Déçue de ne pas en avoir plus, cela était suffisant pour savoir où nous nous trouvions et, probablement, d'être un peu plus serein. Savoir que les démons ne seraient pas dans le coin grâce au Kaig me rassurais un peu. Du moins, si j'avais bien suivis l'histoire, ce qui pouvait encore me faire défaut. J'étais dû genre à apprendre vite mais à qui il fallait expliquer beaucoup avant, dès fois. Surtout dans une situation comme celle-ci où je prenais sur moi pour ne vraiment pas irriter Mina. M'unissant aux efforts fait par Dummkhar pour améliorer l'entente entre nous tous. À tendre les oreilles pour guetter le moindre bruit et à m'assurer de ne pas trop m'avancer en gardant le nain devant moi pour, là aussi, ne pas énerver la vampire à me retrouver devant toute seule. Je n'avais pas très envie non plus de me reprendre une volée de mot désagréable et de me faire vriller les tympans dans ce couloir étroit.

Une foultitude de question m'envahissait l'esprit mais je me risquais à n'en poser aucunes... C'était frustrant mais le moment n'étais pas à cela et si je m'engageais là-dedans, je risquais beaucoup. Déjà que j'étais un poids mort en tant qu'aveugle, je ne voulais pas non plus détourner l'attention de tout le monde sur moi. Surtout envers Mina, je ne désirai pas non plus m'attirer ses foudres, aussi fascinante était-elle pour moi. Si je pouvais m'éviter de perdre un bout de ma gorge pour le moment, ce serait le mieux. Ainsi, je me résolus à me garder mes questions pour plus tard. De toutes manières, Dummy avait dit ce qui était nécessaire. Le connaissant, il ne cacherait pas des informations capitales qui nous permettrait de survivre. Alors je continuais silencieusement à suivre ce dernier, tranquillement, ma main gauche caressant la paroi rocheuse du bout des doigts afin de maintenir mon équilibre et ne pas dévier... Mon pied gauche finira par heurter un petit caillou que je m'empressais de ramasser alors. Pas plus grand que la paume, j'étais tentée de le jeter droit devant moi mais je savais qu'au fond, c'était une mauvaise idée. Le reposant alors au sol en me penchant sur le côté, doucement, sans le lâcher et un nouvel éternuement me pris. Me faisant me cogner le haut de la tête contre la paroi rocheuse.

- Pouah.... Désolée... Dis-je tout bas, me grattant le nez, ces poussières étant si envahissantes et tenaces avant de vérifier l'état de mon front.

Me secouant légèrement la tête, sentant mes joues devenir rouge pourpre, je revins à mon mutisme pour ne pas me ridiculiser davantage et, ce coup-ci, ne plus laisser mon attention divaguer. À force, j'allais commettre une bourde et condamner tout le monde sans même m'en rendre compte. Ydris et Pheare dans mon dos étaient pour le moment silencieuses. Réajustant mon masque sur mon visage, j'attendais les nouvelles indications de mon nain, persuadée qu'il allait m'adresser quelques mots d'ici un instant ou l'autre sur cet endroit. Même si j'avais aucunes idées en quoi pourrait être utile un boulet aveugle qui s'assomme toute seule. Espérons juste que Mina ne me gronde pas à nouveau... Bien que cela m'amusait plus qu'autre chose.

Stupide, j'étais d'un stupide... Shaileen venait de s'adresser à Pheare, lui proposant le même genre d'aide que j'avais pu le faire il y a un mois de cela et, tout en sachant l'humaine incapable d'y répondre, je n'eus absolument pas la présence d'esprit de me faire sa porte parole, attendant un peu plus loin telle une statue. Pire encore je regardais cette dernière gesticuler pour se faire comprendre sans que cela n'entraîne une quelquonque réaction de ma part. La force du choc encore récent avait il eu raison de mon réseau neuronal ? Je pouvait voir la scène se jouer devant moi. Mon corps était présent cependant on aurait pu penser que mon esprit avait déserté le boyau tant je finis par m'exprimer d'une façon creuse pour ne dire qu'une phrase sans aucune importance. Je mourrais d'envie de me gifler. Quoi qu'il se tramait aux tréfonds de mon inconscient, Mina eut le don de me ramener à notre réalité le temps d'un éclat de voix. En somme, l'oubliée se fit une fois de plus réprimander avant que je n'en prenne pour mon grade, ce à quoi je me contentais de hocher brièvement la tête encore un peu...loin. Et tandis que la vampire commençait à harceler Dummkhar sur les origines de cet endroit, j'en profitais pour me rapprocher doucement de Shaileen.

-Shaileen... Commençais je d'une voix assez basse pour lui faire connaître ma présence. Ne le prenez pas mal j'aurais du réagir plus rapidement. A ces mots je lançais un regard d'excuses en direction de l'humaine puis continuait. On ne peut aider Pheare par la magie. Peu importe sa provenance ou sa nature, celle ci aura des effets.... néfastes sur elle. Mais ne vous inquiétez pas Pheare possède une capacité de régénération exceptionnelle.

Je n'étais pas entrée dans les détails, ce n'était pas le moment idéal pour évoquer le monstre assoiffé de sang qui pouvait se révéler en notre compagne humaine. Sur ce, je laissais la jeune oubliée s'éloigner, quelque chose ayant attiré son attention. Je me demandais bien ce dont il pouvait s'agir puisque la vue ne lui fournissait aucun élément qui aurait pu l'attirer. Dés lors je me plaçais aux cotés de l'humaine sans ressentir le besoin de parler. Mina le faisait pour trois et de toute manière la femme chevalier aurait bien du mal à me répondre. Je mis à profit ce temps pour retrouver mes pleines capacités de réflexion encore un peu inquiète de ce qui aurait pu causer ce semblant de perte de contrôle de mes actes et pensées. La seule "séquelle" encore présente était une sorte de migraine lancinante présente à l'arrière de mon crâne. Il n'y avait là aucune bosse, rien, juste cette douleur. Gardant un oeil sur la masquée qui déambula un moment avant de retrouver sa moitié, je pus finalement assister au début du récit du nain concernant le boyau dans lequel nous avions atterri. Une frontière invisible, des démons et une guerre.

Je compris alors qu'il contait ce que Anezka m'avait également évoqué et j'avouais qu'il y avait un coté fascinant à écouter le nain. Sa passion se ressentait, rendait le récit vivant si bien que je pouvais m'imaginer vivre les évènements. Et parmi tout cela une question me taraudait. Ou plusieurs mais se rapportant toute à la premire à savoir, Qui était vraiment Fidia ? D'où venait elle ? Comment avait elle survécu ? Que lui était il arrivé ? Dans tous les cas, avec une telle connaissance, une puissance sans égale et ce séjour qu'elle a apparemment vécu parmi les démons il était presque déconcertant qu'elle n'ai pas cherché à renverser le Sildar lorsqu'il avait sombré. J'étais pourtant sure qu'elle avait ses raisons même si elle m'étaient inconnues pour lors.

Nous avions repris notre marche et je fermais celle ci en compagnie de Pheare, lui portant des regards assez régulièrement comme pour m'assurer qu'elle allait bien. Chacun digérait à sa façon le récit qui venait de nous être conté. Shaileen, qui de ce que j'imaginais était au courant de tout cela, sembla choir avant que je ne me rende compte qu'elle ramassait simplement un caillou avant de le reposer. Il semblait que son attention divaguait assez rapidement. Un éternuement vint d'ailleurs ponctuer nos pas ce à quoi elle ne manqua pas de s'excuser. De mon coté je ressassai une nouvelle fois les paroles de l'ancien ce jour là. Comment demeurer insensible à la souffrance de tout un peuple ? Certes il n'était pas le mien mais Azura si elle était fière n'était pas égoïste et arrogante contrairement aux drows de ce monde ci. Décidant qu'il était important que Mina ai une idée complète de ce qu'il se tramait ici bas, je finis par prendre la parole à mon tour.

- La situation chez les Belrins est pour le moins complexe. Nous avons pu en apprendre quelques bribes lors de notre séjour.  J'ai pu notamment échanger avec Anezka qui se trouve être l'ancienne femme de Sildar. Elle m'a conté cette guerre que vous avez décrite ainsi que ce qu'il en est résulté. Le roi était bon à l'époque mais un seigneur démon qu'il pensait avoir vaincu a, petit à petit, eut raison de son esprit. Prenant le soin de respirer, je continuais, Suite à un... impair de sa femme, le roi devint enragé non seulement contre elle mais aussi contre les oubliés et il obligea la reine Aërlina à établir cette connexion qui existe entre les nains et Sildar. Ainsi ils ne peuvent rien faire contre lui. Quant à Anezka, elle a toujours foi en cette reine des oubliés et nous avait conseillé de rechercher son aide.

Voilà qui constituait un résumé court que j'espérais assez clair de ce que je savais sur les dessous de la surface. Pheare avait peut être eu davantage d'informations durant son séjour éloigné de ma cellule mais ne pouvait malheureusement pas se permettre le luxe de s'exprimer pour l'instant. Au moins nous avions tous une idée dans ce quoi nous marchions. Fidia nous aurait donc guidés ici en toute connaissance de cause cette zone étant protégée mais abandonnée, un Kaig. Il bénéficiait d'un système de protection à toute épreuve semblait il pour qu'aucun démon ou autre animal n'ai choisis d'y faire son logis.

-Pardonnez si ma question vous semble stupide entrepris je, mais si les défenses du Kaig sont toujours actives et incapables de discerner un démon d'une autre créature, comment se fait il que nous soyons encore en vie ? Serait il possible que Fidia ai désactivé son système en prévision de ce qu'il pourrait arriver ? Dans ce cas nous pourrions rencontrer des démons si ceux ci se sont aperçus du changement dans l'air.

Non pas que je cherchais absolument un moyen de mourir ici et maintenant ou que j'espérais des ennuis, au contraire je ne serais pas contre une petite pause histoire de partager sur notre avenir proche ou de laisser les plus blessés d'entre nous souffler un peu. Pour autant il me semblait logique de soulever le moindre détail. Au passage, mon mal de crâne semblait voué à ne pas disparaître de sitôt aussi je préférais me concentrer au maximum sur la situation présente.

Au moment où Shaileen éternua, le Belrin se défia de Mina. Et curieusement, en dehors d'un spasme qui lui raidit l'épaule, dents-pointues conserva son calme, ou tout du moins quelque chose s'en rapprochant. Puis ce fut au tour de l'étrangère au derme obscur de s'exprimer. Ydris de son prénom, apporta une eau riche en minéraux au moulin grinçant de Mina. Beaucoup d'informations découlèrent de son résumé sur l'empreinte d'Anezka. Pourtant la femme n'émit aucune question, ni le plus petit retour, comme si cela ne la concernait point ou pire, qu'elle se contrefichait de leur histoire. Cela allait peut-être de paire avec son caractère, mais surement pas avec la situation ! Comment espérait-elle affronter les dangers de leur monde si elle s'évertuait à cultiver l'ignorance ? Peu engagé à faire l'éducation d'un monstre sous déguisement, Dummkhar choisit de lui préférer l'interrogation d'Ydris. Après ce qui venait d'être dit, celle-ci s'inquiéta du système de défense du Kaig qui ne discernait point le bon du mauvais. Toujours à l'écoute de sa logique, la dame aux paroles mesurées supposa la désactivation du dispositif, et donc, un assaut probable des démons sur leur petit groupe. Après s'être confronté à la rudesse de Mina, il fluctuait un certain apaisement de découvrir une personne aussi investie, tout en demeurant soucieuse de ce que lui était inconnu.

- Soyez sans crainte, Lady Ydris. Répondit posément le Nain. Nous ne sommes point encore arrivé au Kaig, et il y a de fortes chances que depuis ce conduit nous n'ayons guère à rencontrer ce genre de mécanisme. Souriant dans sa barbe, il conclut. Les démons s'agitent depuis l'autre côté du complexe, en somme, nous allons y entrer par la porte de derrière.

Dummkhar jugea bon de ne rien ajouter à son deuxième questionnement, portant sur la progéniture de Prugarass. A savoir que s'il venait à faire une telle rencontre, aucun d'eux n'y survivrait ! Ces créatures investies d'une puissance inouïe requéraient tout le savoir faire des Belrins combiné à la magie des Oubliés pour être repoussées. Mais afin de ne pas lui ôter ses quelques espoirs de survie, le Façonneur estima que le temps pour ce conte n'était pas encore venu. Shaileen toujours accrochée à son bras, Dummkhar resserra l'écart qui le distançait de Mina. Enorgueilli d'une impatience rare, le Nain s'apprêtait à chérir l'instant où il foulerait les vestiges de la prestigieuse Tar'Sen. Et bien que l'heure n'était guère aux réjouissances, Dummkhar ne pouvait réfréner cette passion qui le dévorait.

Manifestement lasse, Mina ne soumit aucune autre question à l'historien. Pheare quant à elle, la main imposée sur son cou, rongeait son frein dans un silence qu'elle n'avait point choisi. Ses tissus manquants tardaient à repousser, si bien que l'inquiétude pouvait désormais se lire sur ses traits. Ydris l'aurait peut-être remarqué, mais perdue dans ses songes comme elle l'était, on ne pouvait-être sûr de ce que ses yeux voyaient. Puis le Vampire stoppa brusquement, sa suite n'avait guère besoin de posséder sa vision pour en comprendre la cause. Pour cause, à une centaine de mètres environ, un renfoncement pailleté de phosphore annonçait la fin du boyau. Mina n'attendit pas d'en savoir plus pour approcher le mur scintillant. De sa main valide, elle parcourut sa surface jusqu'à tomber sur une fente parfaitement rectiligne qui le traversait dans son milieu. Comprenant alors qu'il s'agissait d'une porte, la prédatrice déposa son amie toujours inconsciente sur le sol, puis tenta de la forcer !


Les griffes enfoncées dans l'interstice, Mina déploya toutes ses forces en vue de fendre le roc ! Mais ses ergots furent les premiers à céder. Interloqué par ce soudain acharnement, Dummkhar lâcha la main à présent moite de sa dulcinée, afin d'aborder Dents-pointues. Nullement tracassé par la cécité de Shaileen qu'il savait occultée par l'irradiance de ce minerai, le Nain s'osa à la question.

- Cette portepierre à une raison d'être, vous savez ?

- Oui, à m'empêcher de passer ! Rétorqua le Vampire en fracassant ses poings contre sa surface.

- Mais Mina enfin... Ironisa le Nain. C'est la portepierre du Kaig de Fidia !

- Et après ?!!! Gronda t-elle en y faisant valser son pied.

Comprenant alors que Mina se refusait à la raison, le Façonneur enfonça lentement la moulure marquée d'une formule mathématique qui ressortait sur la partie droite de l'encadrement. Un bruit de meule s'en suivit, et l'instant d'après, la porte était ouverte...

[OUT : Dans le Kaig de Fidia ~ICI~...]